Un violent orage s’invita la nuit suivante, suivi d’intermittentes précipitations accompagnées de fortes bourrasques qui se prolongèrent plusieurs jours, éloignant un peu plus mon rêve d’une possible réconciliation. La tempête intérieure avait fait place à celle qui sévissait au-dehors.
Enfin une accalmie se présenta et, craignant qu’elle ne soit que de courte durée, je ressentis le désir de me distraire en extérieur avec Granite. Ainsi, faisant fi d’un astre du jour convalescent, je me portai tout naturellement vers notre aire de jeu favorite pour partager ces moments de complicité avec mon chien. La crique, d’ordinaire peu fréquentée, était totalement déserte en cette fin de matinée plutôt fraîche pour la saison. Une véritable aubaine pour deux comparses en manque de défoulement.
Arrivée sur la grève, au calme à peine troublé par le ronronnement d’une tondeuse, je pensais naturellement à l’être, si proche et devenu inaccessible, qui accaparait mon imagination et mes rêveries. Ne voulant plus me laisser submerger par l’abattement de ces derniers jours, je voulus chasser toute forme de tristesse ; nos amusements habituels se succédèrent, de lancers de bâton en courses effrénées.
Exténuée, les joues en feu, je dus m’asseoir sur un rocher pour retrouver mon souffle. Devant mon inanition, Granite se posta à mes pieds et se mit à creuser dans le sable détrempé, relevant la tête régulièrement comme pour quémander mon approbation, reprenant la fouille sous mes encouragements. Je me divertissais de son infatigable activité lorsqu’il se figea, le museau enfoui dans le creux déjà bien formé.
Comme il se mit à japper avec insistance, je m’agenouillai pour comprendre l’origine de son excitation : il venait de débusquer un jeune tourteau ensablé. Prenant mon remuant quadrupède dans les bras, détournant son attention pour recouvrir le crabe du sable remué, je le câlinais afin de le calmer et lui faire taire ses stridents aboiements qui perturbaient la tranquillité de ce recoin détaché du monde. Mon chien, apaisé par mes caresses, semblait tout aussi ravi que moi de cette escapade et me faisait part de sa gratitude par de vigoureux lèchements que je ne parvenais pas à esquiver.
C’est sous une atmosphère qui se réchauffait sous un ciel à présent totalement dégagé que je décidais de rentrer. Tonifiée par l’air iodé, je me sentais revivre et ne ressentais plus la moindre affliction.
Comme j’empruntais à contresens le sentier menant à la plage, j’eus une fugace vision. Mon inconscient me jouait-il un tour en me donnant cette subite apparition ? J’eus l’illusion du visage de Philippe m’apparaissant entre deux bosquets de noisetiers bordant le chemin.
— Bonjour, chère demoiselle ! me fit une voix au timbre familier.
Il ne pouvait s’agir d’une hallucination, ce ton si caractéristique était bien le sien. Interloquée, presque craintive, je ne parvenais plus à discerner la forme devenue floue face à un soleil aveuglant. La main en visière pour contrer l’éblouissement, je tentais vainement de reconnaître l’intrus. Granite, que je tenais serré contre moi, émit quelques glapissements en gesticulant d’une façon particulière que je savais interpréter : il connaissait cette personne. Reprenant avec peine mes esprits et un peu de vision, je vis l’homme dévaler prestement le talus qui nous séparait. Revêtu d’une tenue kaki, le crâne enfoncé dans une casquette du même acabit, Philippe m’apparut enfin distinctement, le visage hilare.
— Alors jeune fille, on ne me reconnaît plus ? Décidément, je vais devoir me faire à cette idée !
— J’avais un doute, c’est que je ne m’attendais pas à vous voir ici, tentais-je de me justifier.
— Tss… tss… Tu me tutoies… c’est un ordre !
Comme je restais pantoise, il se reprit aussitôt :
— Je plaisante, mais c’était notre convention et, pour ma part, ça le reste.
S’approchant, il caressa le museau de Granite qui se trémoussait de joie sous ses cajoleries.
— Lui me reconnaît… et on a plutôt l’air d’être copains tous les deux.
Devant mon mutisme persistant, il jugea bon de poursuivre :
— Bon, je me dois de fournir un minimum d’explications. Mes voisins sont partis pour une quinzaine, je surveille la propriété pendant leur absence et m’occupe également un peu du jardin. Je terminais justement de tondre quand j’ai entendu un aboiement qui ne me semblait pas totalement inconnu. Sachant qu’une charmante personne accompagnait ledit chien, je me suis arrangé pour la revoir. Mes éclaircissements conviennent-ils ?
Je dus me mordre les lèvres pour ne pas succomber à la tentation d’éclater de rire. Ainsi, au moment même où je pensais l’avoir définitivement chassé de ma mémoire, le destin – ou était-ce autre chose ? – me le ramenait sans crier gare.
Malgré mes efforts pour amorcer une discussion, muette d’interrogations, je ne parvenais pas à exprimer une seule phrase.
— Que dirais-tu de se revoir ma petite Justine, me demanda-t-il. Serais-tu libre après déjeuner ? Je te promets de ne plus te contrarier, promis.
Plus me contrarier ? Que voulait-il exprimer exactement ? Je me sentais tellement coupable de m’être refusée à une relation et n’osais affronter une nouvelle fois un tel face à face. Pourtant, je désirais tant revivre ces sensations tout juste révélées et que j’augurais plaisantes. Un conflit intérieur, que je pensais avoir définitivement réglé, resurgissait.
Devant tant de questions, je cédais à la tentation de le revoir…
– – –


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